Covid-19 : L’Etat consacre 4 milliards d’euros aux start-ups françaises
Dès le début de la crise sanitaire liée au Covid-19, le gouvernement a accentué son soutien aux jeunes pousses françaises. Un budget de 4 milliards d’euros a permis la création de nouveaux financements et l’abondement de dispositifs existants. Tour d’horizon des mesures de financement dédiées aux start-ups. Un nouveau « Plan Tech » doté de 1,2 milliards d’euros Le 5 juin 2020, le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire et Cédric O, secrétaire d’État chargé du Numérique ont présenté un plan d’attaque pour empêcher les Gafam de racheter les start-ups françaises. Nommé « Plan Tech », ce programme est destiné aux entreprises technologiques comporte 5 mesures : La deuxième mesure comporte une série d’actions cruciales pour les start-ups. Pour soutenir leur trésorerie, l’Etat s’engage à ajouter 80 millions d’euros de budget au fonds French Tech Bridge (présenté plus loin dans cet article) et lance « une offre de prêts d’un total de 100 millions d’euros, distribués par Bpifrance à des start-ups prometteuses ayant conjoncturellement le statut d’entreprise en difficulté et ne pouvant accéder au prêt garanti par l’Etat ». L’accompagnement des start-ups prometteuses passera également par le « Concours mondial d’innovation 2030 ». Le Concours Mondial d’Innovation 2030 est un appel à projets visant à sélectionner les futurs leaders français d’envergure internationale et les accompagner en fonds propres. Pour continuer à accompagner « de nouvelles start-ups lauréates », l’Etat a décidé d’ajouter 120 millions d’euros de budget à ce dispositif. Le concours d’innovation « i-Nov », qui cofinance des projets innovants de PME sur des thématiques stratégiques, a également été abondé de 20 millions d’euros. Enfin, 15 millions d’euros ont été accordés pour la nouvelle vague de Challenges IA, un appel à projets ouvert du 29 mai au 22 juillet 2020. Les mesures exceptionnelles de l’Etat pour les start-ups Les start-ups françaises ont un fort potentiel pour notre économie et un modèle inspirant, mais sont très fragiles et ont des besoins spécifiques. La croissance de ces entreprises dépend par exemple des levées de fonds qu’elles peuvent réaliser par le biais d’investisseurs. Or la crise sanitaire liée au Covid-19 menace l’aboutissement de ces levées de fonds. De fait, « les mois de mars et avril ont enregistré un recul de 32 % du nombre d’opérations par rapport à la même période en 2019, et de 24 % en valeur » selon un article du Monde. C’est pourquoi Bpifrance a annoncé le lancement du « French Tech Bridge ». Doté d’un budget de 80 millions d’euros, ce nouveau dispositif vient précisément financer des « equity bridges » entre deux levées de fonds pour les start-ups qui devaient réaliser une levée de fonds dans les prochains mois, et qui se heurtent à la contraction du capital-risque du fait de l’épidémie de coronavirus. Ce financement peut aller de 100 000€ à 5 millions d’euros et prend la forme d’Obligations Convertibles (OC). Grâce à ce soutien, Bpifrance espère la mobilisation de « 160 millions d’euros en fonds propres pour les startups françaises » au total. Les PME et ETI ont toutefois aussi besoin de soutien face à cette crise. Pour accompagner les start-ups mais aussi les PME et les petites ETI, Bpifrance a lancé le FRPME, le Fonds de Renforcement des PME et le Prêt Garanti par l’Etat (PGE) spécifique à l’innovation. Le FRPME intervient en capital développement pour soutenir le financement du BFR, ainsi que le renforcement ou la restructuration du haut de bilan. Le PGE spécifique à l’innovation est adossé à la garantie de l’Etat. Il a pour objectif de conforter la trésorerie des startups, PME et ETI innovantes qui rencontrent des difficultés conjoncturelles liées à la crise du Covid-19. Les start-ups bénéficient enfin des mesures mises en place pour toutes les entreprises. Le budget de 4 milliards d’euros annoncé par l’Etat comprend également la garantie des prêts de trésorerie de Bpifrance, le remboursement accéléré des crédits d’impôt, ou encore les aides à l’innovation de Bpifrance sur 2020 qui représenteront 1,3 milliards d’euros. En outre, Paul-François Fournier, Directeur Exécutif Bpifrance Innovation, a rappelé que le Fonds innovation de Bpifrance continuera à « soutenir plus de 200 sociétés innovantes au cours de la crise ». Bpifrance a même priorisé le soutien aux start-ups selon leurs besoins en trésorerie dans le temps. Ces mesures suffiront-elles à sauver les start-ups de la faillite ? Les impacts de la crise du Covid-19 sur les dirigeants de start-ups et PME Face à la crise du Covid-19, les dirigeants de PME ont largement utilisé les dispositifs de soutien cités ci-dessus, mais cette crise a pu être fatale pour les entreprises disposant de peu de trésorerie, œuvrant dans les secteurs d’activité à l’arrêt ou dont le business model n’était pas éprouvé (en ce qui concerne les start-ups). Bien qu’il soit encore trop tôt pour constater les conséquences finales de cette crise, les études menées nous apportent des indices. Le baromètre « Trésorerie, Investissement et Croissance des TPE et PME » du deuxième trimestre 2020 de Bpifrance et Rexecode est plutôt pessimiste. Il en sort que « la trésorerie des PME s’est très fortement détériorée au cours des 3 derniers mois », que « l’investissement est attendu en net recul en 2020 » et que « les perspectives de demande sont dégradées ». Seuls 35% des chefs d’entreprises « pensent avoir une trésorerie suffisante pour affronter la crise ». De son côté, Cap digital a publié un baromètre « Start-up & PME face à la crise » axé sur les entreprises innovantes du numérique. Le baromètre de Cap Digital relève une baisse du chiffre d’affaires des entreprises interrogées, une suspension des levées de fonds mais un maintien des effectifs. En termes de financement public, ces entreprises se sont plutôt tournées vers les « appels à projets R&D et innovation » tels que Innov’up Leader PIA, Innov’up Expérimentation et Concours i-Nov. Certaines start-ups ont réussi à profiter de cette crise pour exploser leurs ventes, d’autres ont su se reconvertir à temps, mais beaucoup ont été paralysées dans leur activité ou n’ont pas les reins solides pour affronter ce coup dur. Que restera-t-il de l’écosystème start-up en France ? L’avenir nous le dira…
L’Elysée prévoit 5 milliards d’euros d’investissement dans la French Tech
Le 17 septembre, Emmanuel Macron a profité du lancement du « France Digitale Day » pour faire plusieurs annonces à tous les acteurs de la French Tech. Renforcer le financement des start-ups françaises est l’un des moyens qui sera utilisé pour faire émerger des leaders technologiques mondiaux. Investir plus de 50 millions d’euros par start-up pour créer des « licornes » Pour croître et se développer, les start-ups ont besoin de réaliser des levées de fonds à la hauteur de leur potentiel. Avec seulement 10% du financement mondial dédié aux levées de fonds des start-up, l’Europe arrive loin derrière les Etats-Unis et la Chine. Ce retard s’explique par l’incapacité des fonds d’investissement à accorder plus de 30 millions d’euros aux start-up prometteuses. « La France a suffisamment d’outils pour accompagner la phase d’amorçage des start-ups, mais manque de financements pour soutenir leur pleine croissance. Au bout de 3 ans, les start-ups françaises se trouvent donc face à deux possibilités : tenter de poursuivre leur développement avec des moyens restreints, ou bien vendre leur start-up à une société étrangère. » affirme Frédéric REY, directeur-fondateur de la société de conseil AREAD. Pour lever ce frein à la croissance des start-up technologiques, Emmanuel Macron a annoncé la mobilisation de cinq milliards d’euros de fonds gérés par des investisseurs institutionnels français d’ici trois ans. Deux milliards d’euros viendront alimenter des fonds de capital-risque français, et les trois milliards d’euros restants seront dédiés à l’introduction en bourse des « futurs champions » français. Les start-up de la French Tech pourront ainsi lever plus de 50 millions d’euros et atteindre le statut de licornes, ces entreprises valorisées à plus d’un milliard de dollars. L’ambition du gouvernement est de dépasser les vingt-cinq licornes françaises en 2025. Ces prises de décision ont été guidées par un récent rapport, dans un but bien précis. Financer les technologies de rupture, un pari sur l’avenir La quatrième révolution industrielle (qui correspond à l’ère de la robotisation) est déjà enclenchée, mais l’Union Européenne ne pèse actuellement que 10% de la technologie émergente dans le monde. Investir dans les technologies de rupture n’est pas le choix d’un parti politique, il est celui de la souveraineté de la France et de sa « prospérité future » selon le rapport de Philippe Tibi sur le financement des entreprises technologiques françaises. En effet, la French Tech a un énorme potentiel qui n’est pas suffisamment exploité. Comme l’a souligné Bruno Lemaire suite à ces annonces, la French Tech a la capacité de générer beaucoup d’emplois. L’année prochaine, ce sont 25 000 emplois qui seront créés par cet écosystème, et bien plus si l’Elysée leur donne un coup de pouce supplémentaire. Le Ministre de l’Economie et des finances ajoute que « plus du tiers des emplois créés aujourd’hui aux Etats-Unis le sont directement et indirectement par le secteur technologique », une perspective alléchante pour notre pays touché par le chômage. Faire de la France une « start-up nation » serait également l’assurance d’une puissance économique durable. Cette ambition est à la hauteur des atouts de la France. Malgré certaines défaillances qui empêchent la France de se placer en leader des nouvelles technologies, ce pays reste une grande puissance industrielle. Plusieurs critères en témoignent encore aujourd’hui, auxquels s’ajoutent plusieurs atouts. Ces points sont récapitulés dans le rapport Tibi : Pour remplir l’objectif de devenir le premier acteur de la quatrième révolution industrielle, l’Elysée a prévu d’appliquer d’autres mesures en faveur des start-up technologiques. Le plan d’attaque de l’Elysée pour créer des « leaders technologiques » Google, Facebook, Amazon, Microsoft… Le gouvernement français rêve de tels géants implantés sur son territoire, et veut s’en donner les moyens. Le lendemain des annonces d’Emmanuel Macron, un communiqué nommé « Faire émerger des leaders technologiques de rang mondial » et édité par la Mission French Tech a été publié. Ce document présente une série de mesures pour répondre à cet objectif. Le plan d’attaque de l’Elysée porte sur trois axes : Au-delà des cinq milliards d’euros d’investissement dans les start-ups technologiques, le gouvernement prévoit de pérenniser le « Scale-up Tour » annuel afin inciter les investisseurs étrangers à financer les fonds destinés à la French Tech. Combler le manque de financements dédiés à la French Tech est un premier pas, mais il reste des obstacles réglementaires et administratifs à la croissance de ces entreprises prometteuses. Pour instaurer une relation de confiance entre les start-up technologiques et l’administration et ne pas bloquer les start-up dans leur croissance, le gouvernement mise sur plusieurs nouveaux dispositifs d’accompagnement. Le programme « Next40 » vient d’être lancé et a déjà sélectionné les 40 start-up françaises qui ont la capacité de devenir des leaders technologiques de rang mondial. L’objectif est d’aider chaque année 40 entreprises à croître plus rapidement. De son côté, la French Tech sélectionnera 80 entreprises à potentiel pour les accompagner dans leur croissance. Le gouvernement souhaite enfin résoudre les difficultés de recrutement dans le numérique. Faire émerger des licornes en France nécessite de pouvoir répondre aux nombreuses offres d’emploi dans le numérique qui vont en découler. Or le communiqué souligne qu’il y a déjà « près de 80 000 postes non-pourvus dans le secteur du numérique », et que les start-up sélectionnées par le programme Next40 prévoient d’augmenter « de plus de 30% leurs effectifs dans les 12 prochains mois ». Face à cette urgence, le gouvernement mise sur les talents étrangers par manque de diplômés français dans le domaine du numérique. Cette carence devra être comblée au plus vite pour éviter la fuite des cerveaux. Par ailleurs, l’accent sera mis sur les talents « de tous les horizons socio-économiques » et issus de la recherche.