L’Elysée prévoit 5 milliards d’euros d’investissement dans la French Tech
Le 17 septembre, Emmanuel Macron a profité du lancement du « France Digitale Day » pour faire plusieurs annonces à tous les acteurs de la French Tech. Renforcer le financement des start-ups françaises est l’un des moyens qui sera utilisé pour faire émerger des leaders technologiques mondiaux. Investir plus de 50 millions d’euros par start-up pour créer des « licornes » Pour croître et se développer, les start-ups ont besoin de réaliser des levées de fonds à la hauteur de leur potentiel. Avec seulement 10% du financement mondial dédié aux levées de fonds des start-up, l’Europe arrive loin derrière les Etats-Unis et la Chine. Ce retard s’explique par l’incapacité des fonds d’investissement à accorder plus de 30 millions d’euros aux start-up prometteuses. « La France a suffisamment d’outils pour accompagner la phase d’amorçage des start-ups, mais manque de financements pour soutenir leur pleine croissance. Au bout de 3 ans, les start-ups françaises se trouvent donc face à deux possibilités : tenter de poursuivre leur développement avec des moyens restreints, ou bien vendre leur start-up à une société étrangère. » affirme Frédéric REY, directeur-fondateur de la société de conseil AREAD. Pour lever ce frein à la croissance des start-up technologiques, Emmanuel Macron a annoncé la mobilisation de cinq milliards d’euros de fonds gérés par des investisseurs institutionnels français d’ici trois ans. Deux milliards d’euros viendront alimenter des fonds de capital-risque français, et les trois milliards d’euros restants seront dédiés à l’introduction en bourse des « futurs champions » français. Les start-up de la French Tech pourront ainsi lever plus de 50 millions d’euros et atteindre le statut de licornes, ces entreprises valorisées à plus d’un milliard de dollars. L’ambition du gouvernement est de dépasser les vingt-cinq licornes françaises en 2025. Ces prises de décision ont été guidées par un récent rapport, dans un but bien précis. Financer les technologies de rupture, un pari sur l’avenir La quatrième révolution industrielle (qui correspond à l’ère de la robotisation) est déjà enclenchée, mais l’Union Européenne ne pèse actuellement que 10% de la technologie émergente dans le monde. Investir dans les technologies de rupture n’est pas le choix d’un parti politique, il est celui de la souveraineté de la France et de sa « prospérité future » selon le rapport de Philippe Tibi sur le financement des entreprises technologiques françaises. En effet, la French Tech a un énorme potentiel qui n’est pas suffisamment exploité. Comme l’a souligné Bruno Lemaire suite à ces annonces, la French Tech a la capacité de générer beaucoup d’emplois. L’année prochaine, ce sont 25 000 emplois qui seront créés par cet écosystème, et bien plus si l’Elysée leur donne un coup de pouce supplémentaire. Le Ministre de l’Economie et des finances ajoute que « plus du tiers des emplois créés aujourd’hui aux Etats-Unis le sont directement et indirectement par le secteur technologique », une perspective alléchante pour notre pays touché par le chômage. Faire de la France une « start-up nation » serait également l’assurance d’une puissance économique durable. Cette ambition est à la hauteur des atouts de la France. Malgré certaines défaillances qui empêchent la France de se placer en leader des nouvelles technologies, ce pays reste une grande puissance industrielle. Plusieurs critères en témoignent encore aujourd’hui, auxquels s’ajoutent plusieurs atouts. Ces points sont récapitulés dans le rapport Tibi : Pour remplir l’objectif de devenir le premier acteur de la quatrième révolution industrielle, l’Elysée a prévu d’appliquer d’autres mesures en faveur des start-up technologiques. Le plan d’attaque de l’Elysée pour créer des « leaders technologiques » Google, Facebook, Amazon, Microsoft… Le gouvernement français rêve de tels géants implantés sur son territoire, et veut s’en donner les moyens. Le lendemain des annonces d’Emmanuel Macron, un communiqué nommé « Faire émerger des leaders technologiques de rang mondial » et édité par la Mission French Tech a été publié. Ce document présente une série de mesures pour répondre à cet objectif. Le plan d’attaque de l’Elysée porte sur trois axes : Au-delà des cinq milliards d’euros d’investissement dans les start-ups technologiques, le gouvernement prévoit de pérenniser le « Scale-up Tour » annuel afin inciter les investisseurs étrangers à financer les fonds destinés à la French Tech. Combler le manque de financements dédiés à la French Tech est un premier pas, mais il reste des obstacles réglementaires et administratifs à la croissance de ces entreprises prometteuses. Pour instaurer une relation de confiance entre les start-up technologiques et l’administration et ne pas bloquer les start-up dans leur croissance, le gouvernement mise sur plusieurs nouveaux dispositifs d’accompagnement. Le programme « Next40 » vient d’être lancé et a déjà sélectionné les 40 start-up françaises qui ont la capacité de devenir des leaders technologiques de rang mondial. L’objectif est d’aider chaque année 40 entreprises à croître plus rapidement. De son côté, la French Tech sélectionnera 80 entreprises à potentiel pour les accompagner dans leur croissance. Le gouvernement souhaite enfin résoudre les difficultés de recrutement dans le numérique. Faire émerger des licornes en France nécessite de pouvoir répondre aux nombreuses offres d’emploi dans le numérique qui vont en découler. Or le communiqué souligne qu’il y a déjà « près de 80 000 postes non-pourvus dans le secteur du numérique », et que les start-up sélectionnées par le programme Next40 prévoient d’augmenter « de plus de 30% leurs effectifs dans les 12 prochains mois ». Face à cette urgence, le gouvernement mise sur les talents étrangers par manque de diplômés français dans le domaine du numérique. Cette carence devra être comblée au plus vite pour éviter la fuite des cerveaux. Par ailleurs, l’accent sera mis sur les talents « de tous les horizons socio-économiques » et issus de la recherche.
Les 5 mesures qui vont booster l’innovation de rupture en France
« Le Gouvernement a entrepris une action résolue pour soutenir […] l’innovation de rupture » a déclaré le Premier Ministre dans son discours du 3 mai à Henrichemont. Cinq mesures concrètes vont être appliquées pour favoriser la « deep tech » en France. Le Fonds pour l’innovation et l’industrie de 10 milliards d’euros Le montant du budget accordé à ce nouveau dispositif en dit long sur l’intérêt du Gouvernement pour l’innovation de rupture et les retombées attendues. Il a été constitué par 1,6 milliards d’euros de cessions d’actifs et de 8,4 milliards d’euros d’actions prises dans des sociétés. D’après le dossier de presse de la mise en place du fonds pour l’innovation et l’industrie du 15 janvier 2018, ce mode de financement permettra à l’Etat d’engendrer « un rendement annuel estimé entre 200 et 300 millions d’euros » qui financeront « le développement d’innovations de rupture et leur industrialisation en France ». Pour assurer une continuité entre ce fonds et les aides à l’innovation existantes, un conseil de l’innovation interministériel va être mis en place. L’action du fonds pour l’innovation et l’industrie sera divisée en deux. Au sein du fonds pour l’innovation et l’industrie, un tiers de l’enveloppe sera dédié à l’accompagnement des start-ups de la « deep tech ». Ce terme caractérise les jeunes entreprises innovantes qui, selon le même dossier de presse, développent des technologies : Complexes et fortement différenciantes par rapport aux technologies existantes, issues de la recherche de pointe, fondamentale ou appliquée ; Dont le processus d’industrialisation est lourd, Avec des besoins en investissements importants dans la durée pour les infrastructures et les compétences, Pour des marchés applicatifs pas toujours clairement identifiés en début de développement. Le soutien à ces entreprises prendra la forme d’un « concours ouvert aux start-ups technologiques » d’un budget de 15 millions d’euros. De plus, Bpifrance va lancer un « programme dédié deep tech » pour un montant d’aide à la faisabilité et aux démonstrateurs techniques de 55 millions d’euros par an. Ce programme regroupera des aides à l’innovation « sous forme de subventions, avances récupérables et prêts ». La seconde enveloppe du fonds pour l’innovation et l’industrie financera des projets plus spécifiques. La France soutient l’#innovation ! C’est pour cela que nous avons créé un fonds pour financer l’innovation de rupture, pour commencer dès aujourd’hui à réfléchir aux technologies de demain !#PFF18 #FinTech pic.twitter.com/dWv4RjaQQ7 — Bruno Le Maire (@BrunoLeMaire) January 30, 2018 La seconde enveloppe, quant à elle, se focalisera sur les « grands défis de l’innovation de rupture » comme l’intelligence artificielle, la nanoélectronique, etc… Les projets financés dans ce cadre devront faire intervenir des « laboratoires, PME et grands groupes ». Le fonds pour l’innovation et l’industrie répond au manque de financement de l’innovation de rupture en France, mais d’autres facteurs empêchent actuellement l’innovation de rupture de se développer. L’assouplissement des démarches d’innovation pour les entreprises La France détient tous les moyens d’innover et dispose d’un réseau d’universités et de grandes écoles important. Or la recherche publique ne communique pas suffisamment avec les entreprises car le système actuel ne le permet pas forcément. Pourtant cette collaboration permet à la fois aux entreprises de créer des emplois et aux organismes de recherche de valoriser leurs travaux. C’est pourquoi 4 mesures phares vont être engagées en ce sens. Premièrement, la loi PACTE fera évoluer les dispositions du Code de la recherche en faveur des chercheurs entrepreneurs. Dans l’avenir, les procédures d’autorisations de création d’entreprise et la répartition du temps de travail entre le laboratoire public et l’entreprise seront simplifiées. Les chercheurs pourront ainsi : Consacrer jusqu’à 50% de leur temps de travail dans l’entreprise (contre 20% auparavant) ; Reprendre une entreprise valorisant leurs travaux, Participer au conseil d’administration ou de surveillance d’une société de capitaux, Conserver une participation au capital dans la limite de 49%. La deuxième mesure se trouve toujours dans la loi PACTE. Elle vise à faciliter l’accès des start-ups et PME à la propriété intellectuelle pour mieux protéger et valoriser leurs innovations. Demain, les PME pourront donc : Faire une demande provisoire de brevet ; S’orienter vers le certificat d’utilité qui deviendra plus attractif, Déposer des brevets de qualité et mieux protégés. Avec la loi PACTE, le certificat d’utilité pourra notamment être utilisé jusqu’à 10 ans, au lieu de 6 actuellement. Malgré les efforts du Gouvernement pour faire collaborer les organismes de recherche publics et les entreprises, il reste nécessaire de « simplifier l’accès des entreprises aux innovations issues de la recherche publique ». C’est l’objet de la troisième mesure. En effet, les opérateurs publics de recherche seront appelés à renforcer leur accompagnement aux start-ups (mandataire unique, contrats types de partenariats, etc…). Enfin, le Gouvernement s’est penché sur une autre problématique. Dans son discours du 29 mars 2018, Emmanuel Macron a constaté que le temps de test d’une innovation était actuellement trop long et que les formalités constituent une entrave au développement des projets innovants, alors même que cette étape est fondamentale pour les entreprises. Par conséquent, le processus d’expérimentation des innovations doit être simplifié. Cette démarche a déjà été amorcée depuis 2016 avec le lancement de l’appel à projets « France Expérimentation ». Cette initiative avait pour objectif de recueillir les suggestions d’amélioration des entreprises vis-à-vis des normes et des procédures administratives. Il est prévu que les informations recueillies jusqu’ici soient intégrées au projet de loi PACTE. En 2018, l’appel à projets va évoluer, notamment en devenant permanent.