Crédit d’Impôt Recherche : le gouvernement s’explique sur le contrôle fiscal
Le contrôle fiscal du Crédit d’Impôt Recherche effraye la plupart des entreprises, pensant qu’elles y passeront forcément et qu’elles seront redressées. Fausse idée ! Le gouvernement a officiellement éclairci ce point fin février. Le fonctionnement du contrôle fiscal dans le cadre du CIR Le 31 octobre 2017, le député de l’Aisne Julien Dive a adressé la question suivante à Bruno Lemaire, ministre de l’économie et des finances : « Combien d’entreprises ayant eu recours au crédit impôt recherche ont été soumises l’année n+1 ou n+2 de ce recours à un contrôle de l’administration fiscale » ? Cette question a été motivée par l’absence apparente de statistiques officielles sur ce point. En effet, Julien Dive fait état de « certaines études » qui auraient démontré une augmentation importante du nombre de contrôles fiscaux, « notamment ceux auprès des entreprises ayant bénéficié du crédit impôt recherche ». Or ces résultats laisseraient entendre que l’administration fiscale vise volontairement les nombreuses TPE, PME et ETI bénéficiaires du CIR, pour qui un redressement fiscal peut être dommageable. A moyen-terme, ces mêmes entreprises pourraient se détourner du CIR, de même que les potentiels bénéficiaires. Le gouvernement a cependant réfuté une partie de ces affirmations. Dans sa réponse publiée le 27 février, le gouvernement rejette d’abord l’idée que les contrôles fiscaux seraient orientés consciemment vers les entreprises bénéficiaires du CIR. Ils seraient au contraire menés « dans le cadre d’une stratégie globale […] sur tous les impôts », en mettant hors de cause « la demande ou l’attribution d’un crédit d’impôt recherche » dans la procédure de contrôle fiscal. Ce propos est néanmoins nuancé en fin de phrase par la condition « en fonction des enjeux et des risques ». En souhaitant préciser ce point, le gouvernement concède finalement que l’administration fiscale s’accorde le droit de cibler les bénéficiaires du CIR lorsque le principe de « concurrence loyale » est menacé. Concrètement, l’administration fiscale contrôle surtout les entreprises bénéficiaires du CIR lorsque celles-ci déclarent des montants importants de CIR, ou dans un secteur d’activité où des travaux de R&D sont difficilement réalisables (exemple : une agence immobilière). Il arrive également que les entreprises déclarant pour la première fois du CIR soient contrôlées. Cette manière de procéder peut être compréhensible par la forme déclarative du CIR mais surtout en raison du budget que ce dispositif représente pour l’Etat (à savoir 5,5 milliards d’euros pour 2017) et des abus qui posent désormais problème… Par ailleurs, le gouvernement a démenti l’augmentation des contrôles fiscaux sur le CIR ces dernières années, preuves à l’appui. Les vraies statistiques du contrôle fiscal sur le CIR Pour répondre à la seconde interrogation de Julien Dive sur l’augmentation des contrôles fiscaux auprès des bénéficiaires du CIR, le gouvernement a présenté un tableau qui reprend le « nombre de déclarants CIR » entre 2011 et 2016 et le « nombre de contrôles avec rectification sur CIR » : D’après ces chiffres, on constate que le nombre de contrôles fiscaux (avec rectification) sur le CIR n’a pas dépassé les 6% des déclarants CIR, ce qui est assez faible. De plus, le nombre de contrôles (avec rectification) sur le CIR n’a pas augmenté proportionnellement au nombre de déclarants CIR entre 2011 et 2014. En effet, alors que le nombre de déclarants CIR a bondi de 8,2% en 2013, la part de déclarants CIR dont le contrôle a donné lieu à une rectification a seulement augmenté de 0,3 points pour ensuite stagner en 2014, face à une augmentation de 0,4% des déclarants CIR. En 2015 et 2016, le nombre de déclarants CIR a stagné à 24 253 entreprises, et la part de déclarants CIR dont le contrôle a donné lieu à une rectification a baissé de 1,1 point en 2015 et de 4,1% en 2016. Néanmoins, l’analyse ne peut être complète puisque le tableau ne précise pas le nombre de contrôles sur le CIR l’année n+1 ou n+2 du recours à ce dispositif par les entreprises comme le député Julien Dive l’avait demandé. De plus, ce tableau ne donne pas le nombre de contrôles sur le CIR sans rectification et le nombre de contrôles fiscaux sur les entreprises en général. Tandis qu’il est difficile de trouver le nombre de contrôles sur le CIR sans rectification, nous avons pu trouver le nombre de contrôles fiscaux sur les entreprises en général dans les cahiers statistiques de la direction générale des finances publiques de 2014 et de 2016. Il en ressort les tendances suivantes : Au vu de ces statistiques, il semble que le nombre de contrôles fiscaux sur pièces et de vérifications de comptabilité n’aient pas augmenté ces dernières années, bien au contraire. Ces chiffres représentent par ailleurs une infime proportion sur le nombre d’entreprises en France qui était de 3,56 millions en 2012 et de 4,2 millions en 2014. En tout état de cause, les entreprises n’ont pas d’inquiétude à avoir sur le contrôle fiscal du CIR si elles respectent bien les critères d’éligibilité, et si elles font appel à un cabinet de conseil pour le montage de dossier.