Dévoilé le 27 septembre, le projet de loi de finances pour 2020 confirme les annonces du gouvernement sur la revue de plusieurs aides publiques aux entreprises. Quelles en seront les conséquences pour les entreprises ? Décryptage.
Réduction des frais de fonctionnement du CIR et du CII
Le Ministre de l’économie et des finances l’avait annoncé le 11 juillet, et le PLF 2020 vient appuyer ces paroles. Le gouvernement souhaite réduire le taux de crédit d’impôt accordé aux frais de fonctionnement du CIR. Or, comme nous l’avons indiqué dans cet article, les frais de fonctionnement incluent plusieurs types de dépenses dont le taux de prise en compte est très variable. Le PLF 2020 apporte plus de précisions sur ce point.
L’article 49 du projet de loi de finances pour 2020 stipule que le taux de prise en compte des frais de fonctionnement passera de 50% à 43%, mais uniquement pour les dépenses de personnel. Par conséquent, les dépenses pour le recrutement de jeunes docteurs qui est actuellement de 200% et les dotations aux amortissements dont le taux est fixé à 75% ne seront a priori pas impactés. Cet article fait toutefois référence à la fois au Crédit d’impôt Recherche et Innovation (CII), ce qui n’avait pas été clairement exprimé lors de l’annonce de cette mesure. Pour l’instant, aucun amendement n’a été ajouté à cette proposition. Le gouvernement a par ailleurs fait marche arrière sur une ancienne décision.
Une seconde décision a été prise dans l’article 49, qui vient annuler celle de la loi de finances pour 2019. Celle-ci avait abaissé « de 100 millions d’euros à 2 millions d’euros le seuil de dépenses de recherche au-delà duquel il est fait obligation aux sociétés de remplir l’état annexe à la déclaration de CIR décrivant la nature des travaux de recherche en cours ». Or le PLF 2020 rétablit le seuil de 100 millions d’euros pour décharger les « petites entreprises ou les entreprises en phase d’amorçage » qui ont du mal à supporter ce poids administratif. Si ces mesures sont validées, elles seront effectives au 1er janvier 2020. Le PLF 2020 aurait-il oublié d’évoquer d’autres dispositifs incontournables, alors même qu’ils prendront fin le 31 décembre 2019 ?
Quel avenir pour le statut JEI et le crédit d’impôt métiers d’art ?
Le projet de loi de finances pour 2017 avait repoussé au 31 décembre 2019 la date de fin du statut Jeune Entreprise Innovante (JEI) et du crédit d’impôt métiers d’art (CIMA). Etonnamment, ces deux dispositifs ne sont abordés à aucun moment dans le PLF 2020. Le gouvernement aurait-il décidé de les abandonner ? Le statut JEI et le CIMA sont pourtant appréciés des entreprises françaises, et leur permet de soutenir leur croissance.
Le statut Jeune Entreprise Innovante est un avantage fiscal accordé aux nouvelles entreprises actives en R&D, indépendantes et qui ont moins de 8 ans. Selon la DGE, le statut JEI a été accordé à 3500 entreprises en 2015. Les exonérations dont bénéficient ces entreprises leur permet d’effectuer des recrutements et de continuer à développer leurs produits innovants. Ce statut est à justifier chaque année et l’URSAFF peut effectuer un contrôle du statut JEI, ce qui empêche les éventuels abus. Bien que les sociétés bénéficiaires du statut JEI sont souvent éligibles au CIR, celles-ci perdraient les exonérations fiscales et patronales. Le gouvernement devrait s’exprimer prochainement à ce sujet. La question subsiste également pour le crédit d’impôt métiers d’art.
Alors que le PLF 2020 a prolongé le crédit d’impôt textile (ou collection) jusqu’au 31 décembre 2022, il n’est pas question du crédit d’impôt métiers d’art dans ce premier texte. Ce dispositif bénéficie aux entreprises du secteur des métiers d’art qui réalisent de la création artisanale d’excellence. Il permet d’obtenir un crédit d’impôt de 10% des dépenses éligibles (salaires, charges sociales, dotations aux amortissements, etc…). S’il n’était pas renouvelé, le CIMA prendrait aussi fin le 31 décembre 2019. La disparition du CIMA ne devrait pas avoir d’impact négatif sur les entreprises bénéficiaires, puisqu’il s’agit surtout de petites entreprises pour lesquelles un crédit d’impôt de 10% n’a pas de retombées significatives.
Enfin, le gouvernement a tenu sa parole au sujet de la suppression de niches fiscales aux entreprises.
Coup de frein sur certaines dépenses fiscales pour les entreprises
L’annonce de la suppression de « niches fiscales » à destination des entreprises n’était pas passée inaperçue. C’était le 25 avril 2019, lors d’une conférence de presse d’Emmanuel Macron. Cette initiative a trouvé sa source dans un rapport de Joël Giraud qui a dénoncé le manque de données fiables pour prendre position sur plus de 470 niches fiscales recensées. Convaincu qu’un nettoyage de ces niches fiscales permettrait de faire des économies, le gouvernement formule 2 propositions dans le PLF 2020 :
- Limiter certaines dépenses fiscales ;
- Supprimer les dépenses fiscales « inefficientes ».
Pour répondre au besoin d’évaluation des niches fiscales, l’article 7 du projet de loi de finances pour 2020 propose de prolonger 3 dépenses fiscales. La première est le crédit d’impôt textile cité plus haut, la deuxième est le crédit d’impôt dirigeant (prolongés jusqu’au 31 décembre 2022), et la troisième est le crédit d’impôt pour la création de crèches d’entreprises (jusqu’au 31 décembre 2021). Cinq autres dépenses fiscales seront d’emblée supprimées le 1er janvier 2020 si le PLF 2020 est validé, à savoir :
- L’exclusion temporaire du revenu imposable des bénéfices provenant de l’exploitation de terrains auparavant non cultivés affectés à des cultures agréées pour la détermination du revenu imposable afférent aux exploitations agricoles situées dans les départements d’outre-mer (DOM) ;
- La réduction de l’impôt de 40 % au titre des sommes consacrées par les entreprises à l’achat d’un trésor national,
- L’exonération de TVA relative à la mise en valeur agricole de terres dans les DOM,
- L’exonération des résultats provenant d’opérations dans une zone d’aménagement concerté,
- L’exonération des droits d’enregistrement des actes de constitution et de dissolution des sociétés de bains-douches et des sociétés coopératives artisanales, ainsi que des actes intéressant les sociétés mutuelles et de secours des ouvriers et employés de mines.
Le gouvernement a finalement décidé de supprimer des dépenses fiscales qui ne pénaliseront pas les entreprises françaises.