Telle est l’annonce formulée par le ministre de l’Économie Bruno Lemaire le 11 juillet. Ce projet s’inscrit dans la lutte du gouvernement contre les niches fiscales des entreprises. Applicable dès 2020, cette mesure pourrait avoir des conséquences pour les bénéficiaires du Crédit d’Impôt Recherche.
L’impact des frais de fonctionnement dans la déclaration du CIR
Le Crédit d’Impôt Recherche permet notamment de financer les dépenses de fonctionnement liées aux opérations de recherche et développement. Il s’agit des dépenses liées au personnel, aux démarches administratives, aux matières premières, etc… Actuellement, les frais de fonctionnement sont fixés forfaitairement à hauteur de :
- 50% des dépenses de personnel pour les chercheurs et techniciens de recherche ;
- 75% des dotations aux amortissements pour les immobilisations,
- 200% des dépenses de personnel pour le recrutement de jeunes docteurs.
Or dans son discours adressé à l’Assemblée Nationale lors du Débat d’orientation des finances publiques, Bruno Lemaire a proposé de ramener le taux des frais de fonctionnement à 43% des dépenses, sans préciser le(s)quel(s) des trois taux actuels serai(en)t concerné(s). Alors qu’une baisse du taux de 50% à 43% pour les chercheurs et techniciens de recherche aurait un impact minime pour les entreprises bénéficiaires, son application aux immobilisations et surtout aux jeunes docteurs deviendrait problématique.
Plus tôt dans son discours, le ministre Bruno Lemaire montre son attachement au coût compétitif des ingénieurs que permet le CIR, ce qui semble contradictoire avec sa proposition de raboter les frais de personnel éligibles au CIR. Néanmoins, cette idée provient initialement de la Cour des comptes qui proposait un « taux compris entre 40 et 46% ».
La réduction du taux lié aux frais de fonctionnement n’est pour l’instant qu’une « vague » proposition, laquelle sera tout de même étudiée dès la rentrée dans le cadre du PLF 2020. L’objectif serait de « dégager un rendement de 200 millions d’euros dès 2021 ». Cette initiative est motivée par la volonté de récupérer 1,4 milliards d’euros en 2021 sur les niches fiscales aux entreprises dont le CIR fait partie. Un projet qui s’avère plus complexe que prévu…
Désillusion face aux « trous noirs » que sont les niches fiscales aux entreprises
Pour concrétiser la baisse des impôts sur le revenu, le gouvernement a besoin de trouver 5 milliards d’euros. S’attaquer à quelques dépenses fiscales parmi les 472 existantes (qui représentent près de 100 milliards d’euros) est l’occasion rêvée pour « trouver quelques centaines de millions d’euros », comme l’indiquait Gérald Darmanin dans son interview à Europe 1. C’était sans compter l’obscurité de ces fameuses niches fiscales.
Faire le tri dans les niches fiscales aux entreprises nécessitait d’abord une étude de ces dispositifs. Ainsi, le Rapporteur général de la commission des Finances Joël Giraud a conduit une analyse dont les conclusions sont alarmantes. En présentant son rapport à l’Assemblée Nationale, Joël Giraud a insisté sur le manque de chiffrage, d’évaluation et de pilotage lié à ces niches fiscales. Il qualifie même la notion de niche de « floue voire abstraite ». Comment arbitrer sur la modification ou la suppression de niches fiscales sans données fiables ?
Malgré les « trous noirs » qui ont affecté cette analyse, il en ressort que 400 dépenses fiscales peuvent être modifiées ou supprimées. Le crédit d’impôt recherche serait la « principale dépense fiscale active » avec un montant de 6,2 milliards d’euros, mais ce dispositif est considéré comme un « bon outil » qu’il faudrait juste « rendre plus efficient et rationnel ». En conclusion, Joël Giraud préconise la « suppression des niches fiscales non évaluées » ou demande au moins de fournir une évaluation de ces niches dans un délai imparti. Alors qu’il visait une économie de 1,5 milliards d’euros à court-terme, le gouvernement revoit ses objectifs à la baisse, indiquant plutôt le chiffre de 615 millions d’euros en 2020.